Actualités de la bibliothèque Alphonse Dupront – Avril – juin 2019

Fonds Jacques Maître

Jacques Maître (1925-2013) fut l’un des membres fondateurs du Groupe de sociologie des religions (GSR) au sein du Centre d’études sociologiques du CNRS. Premier laboratoire de sociologie des religions inscrit dans la filiation de Durkheim et Mauss, le GSR a été créé en 1954 par Gabriel Le Bras (1891-1970) et Henri Desroche (1914-1994) avec François-André Isambert, Émile Poulat et Jacques Maître. Arrivé peu après dans l’équipe, Jean Séguy (1925-2007) peut être intégré à ce groupe pionnier. Le GSR a notamment créé en 1956 la revue Archives de sociologie des religions, devenue Archives de sciences sociales des religions en 1973, éditée depuis 2005 par les Éditions de l’EHESS. Le Programme de recherche interdisciplinaire sur le religieux lancé depuis deux ans au sein de l’EHESS a mis à l’ordre du jour la sauvegarde de la mémoire des pionniers de la refondation nationale, après-guerre, des sciences sociales des religions ; une histoire qui est étroitement associée à la création de la 6e section de l’EPHE en 1947. Le projet consiste à rassembler de façon solidaire, notamment par des liens numériques, les fonds respectifs des pionniers du GSR dans le cadre du futur pôle documentaire et archivistique du Campus Condorcet. Comme Jean Séguy dont le fonds vient d’être légué à l’EHESS (2013) par Danièle Hervieu-Léger, Jacques Maître n’a pas fait carrière au sein de l’EHESS mais au CNRS (à la différence des autres membres fondateurs du GSR, tous directeurs d’études de la 6e section, puis de l’EHESS). Il fut cependant l’animateur infatigable du GSR qu’il dirigea notamment dans les années 1980.
Son parcours intellectuel se répartit en plusieurs axes de recherche. Après avoir été l’assistant de Georges Gurvitch, il participe à la création du GSR en apportant aux enquêtes quantitatives sur la pratique religieuse initiées par Gabriel Le Bras un cadre méthodologique décisif sur la mesure des appartenances religieuses. Ses articles et manuels sur la statistique des phénomènes religieux sont précieux au moment même où se développent les méthodes d’analyse de données. Plus qualitativement, s’ajoute à cela sa contribution à la connaissance des mutations qui affectent l’encadrement ecclésial au moment de Vatican II, notamment la transformation du sacerdoce pastoral. À partir des années 1970, il initie un programme de recherche sur la psychanalyse socio-historique des figures mystiques telle Thérèse de Lisieux qui au fil d’enquêtes intensives étalées sur une vingtaine d’années aboutit à une œuvre originale dont le caractère novateur est salué par Pierre Bourdieu et le milieu des historiens. Outre d’importantes responsabilités prises au cours des années 1980 dans l’administration de la recherche au CNRS, il contribue au développement de la sociologie de la santé mentale en intégrant une unité de recherche de l’INSERM. Au terme de sa longue carrière, sa veine militante d’ancien jeune résistant et de syndicaliste engagé se révèle encore dans une ultime enquête de terrain sur les séquelles durables de l’épandage de défoliants par l’armée américaine dans la compagne vietnamienne.
Jacques Maître ayant souhaité permettre l’accès de sa documentation aux chercheurs, sa famille, représentée par sa fille Elisabeth, lègue à l’EHESS ses dossiers professionnels ainsi que sa bibliothèque scientifique.
Le fonds Jacques Maître est désormais disponible pour consultation à la Bibliothèque Alphonse Dupront.

Liste du fonds Jacques Maître

Share This: