Une formation filmique au CéSor

Depuis quelques années, plusieurs chercheuses du CéSor s’intéressent à la création de films documentaires, cherchant de nouveaux outils capables d’apporter une dimension plus sensible à leurs recherches de terrain. Dès 2013, un stage avait donné une première impulsion. Il avait été réalisé dans le cadre du LabEx HaStec au sein de son axe 3 intitulé « Les techniques du (faire) croire » coordonné par Nathalie Luca. A l’époque, huit chercheuses issues de différentes disciplines (philosophie, histoire, anthropologie), dont trois du CéSor (Cécile Boëx, Emma Aubin-Boltanski et Nathalie Luca), encadrées par trois anthropologues spécialisés en anthropologie filmique (Damien Mottier, Baptiste Buob, Nadine Wanono) et également par Stéphane Eloy pour ses compétences à la fois en prise de vue et montage, avaient passé dix jours à l’abbaye Notre Dame de la Trappe. Elles avaient appris à manipuler une caméra et réussi la réalisation de quatre documentaires d’une quinzaine de minutes portant chacun sur un moine. Le résultat, présenté notamment au Musée du quai Branly, avait été salué comme donnant une appréhension très riche de la vie monacale au sein de l’abbaye. D’autres films ont ensuite été réalisés, notamment par Emma Aubin-Boltanski et Nathalie Luca, toujours avec l’aide du LabEx HaStec. Par ailleurs, Cécile Boëx a rejoint le CéSor en tant que MCF à l’EHESS sur un projet novateur portant sur l’analyse des vidéos de la révolution syrienne postées sur les réseaux sociaux. Elle prépare actuellement un film à partir d’un montage de ces vidéos. Il apparaissait donc important de renforcer cette orientation filmique au sein du CéSor et de permettre aux chercheurs intéressés (en l’occurrence, pour l’instant, cela concerne essentiellement des chercheuses) d’élargir leurs compétences dans ce domaine. Grâce à Boris Pétric (coordinateur du Groupe de Recherche « Images, écritures transmedia et sciences sociales » dont le CéSor est partenaire), Nathalie Luca a pu rencontrer Hélène Ricome, réalisatrice et responsable de formation. C’est avec elle, et en suivant les recommandations de Sandrine Kassor, (conseillère – Pôle Accompagnement RH-Formation du service des ressources humaines de la délégation Paris Centre), que le CéSor a pu organiser une formation sur l’écriture filmique entièrement financée par la délégation Paris Centre pour quatre chercheuses : Emma Aubin Boltanski, Nathalie Luca, Sabrina Mervin et Sepideh Parsapajouh. 

En trois sessions d’une semaine déployées sur 7 mois, au cours de l’année 2019, la formation, encadrée par Hélène Ricome et Céline Loiseau (productrice – TS productions), a permis à chaque participante d’articuler son projet de film sur son terrain de recherche, d’en développer l’écriture et d’appréhender la question de sa mise en production. Les formatrices avaient un double objectif : « le premier était de développer concrètement les projets de films de chaque chercheuse, mettant à leur disposition les outils méthodologiques des écoles de cinéma documentaire ; le second était d’interroger les liens, les oppositions et les résonances entre langage scientifique et langage cinématographique ». La première session a été consacrée à l’écriture. Il s’est agi d’identifier l’intention et le désir du film. Pour cela, un réalisateur, Nicolas Hans Martin, a présenté son film « Roméo et Kristina ». La seconde session s’est centrée sur la construction narrative (passant par la définition des personnages, ou par une interrogation sur la forme à adopter). Deux intervenantes, la cheffe opératrice Sylvie Petit et la monteuse, Mélanie Brun, ont présenté leurs métiers et permis de mieux appréhender la richesse de chacune des étapes de construction du film. Enfin, la troisième session a consisté à préparer la présentation orale des projets documentaires dans l’optique des journées de rencontres professionnelles du festival Jean Rouch. Entre temps, les quatre chercheuses ont eu l’occasion de s’exercer en participant au Salon des écritures alternatives en SHS en janvier 2020 lors d’une session intitulée « Mon projet en 15 minutes » à laquelle Cécile Boëx s’est associée. Grâce à cette préparation, l’après-midi de restitution du 26 février 2020 au Festival Jean Rouch a été particulièrement fructueuse. Le public était nombreux et réactif ; les producteurs, présents dans la salle, ont manifesté leur intérêt pour ces projets. La mise en production des quatre films est donc en bonne voie.

(De gauche à droite) Hélène Ricome, Emma Aubin-Boltanski, Sepideh Parsapajouh, Nathalie Luca, Sabrina Mervin, Céline Loiseau au festival Jean Rouch, Musée de l’Homme, 26 février 2020

Voici les quatre projets dans leur état d’aboutissement actuel, présentés par leurs auteurs :

Envol, par Emma Aubin Boltanski

Un envol de pigeons au-dessus de la terrasse de Mahmoud. Novembre 2019. Crédits : Thierry Magniez

Mahmoud a fui la guerre qui ravage son pays, la Syrie. Depuis, il est piégé dans un bidonville appelé Hayy Gharbeh : une zone misérable qui jouxte le camp de réfugiés de Sabra à Beyrouth. Cet homme cependant a trouvé le moyen d’échapper à cette réalité misérable. Quelques heures par jour, il monte sur sa terrasse pour s’adonner au kashsh, la « passion du pigeon », un jeu très répandu au Proche-Orient : il fait tourner des escadrilles de pigeons au-dessus des toits. Les yeux rivés vers le ciel, par le biais de ces oiseaux, il s’envole et rêve, mais ce jeu qui consiste également à chasser et à attraper les pigeons d’autres colombophiles engage aussi son honneur et sa virilité, et peut dégénérer. Les armes ne sont jamais loin.

Envol, le film que je développe et sur lequel j’ai écrit un synopsis dresse le portrait de Mahmoud. Je le réaliserai en collaboration avec le photographe et chef opérateur Thierry Magniez.

Lorsque j’ai rencontré Mahmoud pour la première fois sur sa terrasse, il était en pleine action. La tête tournée vers le ciel, il faisait tourner sa fronde dans sa main droite. Il a pris de l’élan et d’un mouvement leste et vigoureux a propulsé une orange pourrie en direction de ses pigeons. Puis, il s’est immobilisé, s’est tourné vers moi et sans préambule a lancé d’un ton narquois : « C’est l’heure de partir à la chasse ! » Les yeux vifs, un grand front bombé, la peau tannée, un corps sec et nerveux, il exultait. Il était beau.

Le contraste avec l’homme lorsqu’il est en bas est stupéfiant. J’étais dans la rue avec des femmes lorsqu’une personne s’est avancée vers moi en quémandant timidement : « Miss, pourrais-je te parler ? » C’était lui, mais il m’a fallu quelques secondes pour le reconnaître. Tout ce qui cinglait en lui de vif et d’ardent, cette légèreté joueuse et féroce, ce pas de roi qu’il avait sur sa terrasse au milieu de ses pigeons s’était volatilisé. Petit, maigre, les épaules voûtées, le regard apeuré, la démarche hésitante, j’avais un réfugié en face de moi. « Miss ». Un réfugié qui m’interpellait avec la déférence réservée aux « internationaux » employés dans les ONG.

Envol entend poursuivre une réflexion que je conduis depuis plusieurs années sur le désir de transcender la réalité sociale et politique dans laquelle on se trouve piégé. À travers les pigeons qui s’envolent et évoluent librement dans l’espace aérien, Mahmoud rêve d’un ailleurs possible et d’un renversement de situation. Il s’agira de donner à voir la part onirique de cette activité. Pour ce faire, ce documentaire dressera le portrait de Mahmoud en le suivant dans son quotidien. Deux espaces seront contrastés (un « en bas » et un « en haut ») pour dévoiler les différentes facettes du personnage : d’une part, le réfugié humilié et sans horizon piégé dans un « en-bas » poisseux et étouffant (les rues du bidonville de Hayy Gharbeh, son logement insalubre) et, d’autre part, le maître colombophile rayonnant et faisant voler le monde au-dessus des toits de Beyrouth, s’échappant avec ses volatiles vers un « en-haut » (sa terrasse et le ciel) ouvert et libérate

Au nom de la tubéreuse, par Sepideh Parsapajouh


Polianthes tuberosa illustration from Les liliacées (1805) by Pierre Joseph Redouté (1759-1840). Digitally enhanced by rawpixel.

La tubéreuse est une fleur blanche, très parfumée, qui continue à diffuser son parfum pendant des jours après avoir été coupée. On l’aime beaucoup en Iran où elle représente la passion et la beauté. En persan on l’appelle Maryam ; c’est aussi le prénom de ma mère.

Le jour du dixième anniversaire de la mort de ma mère, un jour comme tous les autres et comme toutes les années précédentes, alors que j’étais en train d’écrire sur les martyrs de la guerre Iran-Irak, j’ai fait un malaise. Je perdais mon souffle et mes moyens ; tout disparaissait, se volatilisait, devant mes yeux : mes racines, mes proches, ma personne, mon terrain de recherche, mes pensées… Tout se noyait dans le passé, et le passé emportait avec lui aussi l’avenir.

Je suis anthropologue. Mon terrain de recherche est ailleurs, comme celui de la plupart des anthropologues. Or cet ailleurs, dans mon cas, est chez moi. C’est l’Iran. Je vis en France depuis 2006. J’y suis venue pour rédiger ma thèse et puis … j’y suis restée, alors que j’étais chargée de cours à de l’Université de Téhéran. J’ai travaillé d’abord sur la ville de Téhéran et ses marges, puis, depuis Paris, sur le domaine du religieux et de la croyance en Iran, comme pour mieux comprendre l’univers dans lequel j’avais grandi, jusque-là trop proche pour l’appréhender. Cela fait bientôt trois ans que je ne suis pas retournée en Iran. Plus je guette la possibilité d’un éventuel retour, moins j’en trouve. Depuis l’été dernier, cet espoir paraît totalement envolé à cause des événements politiques. Face à cette impasse, l’idée de faire un film documentaire qui revisiterait l’histoire contemporaine de l’Iran par le biais de mon histoire personnelle m’est venue à l’esprit comme une solution pour dénouer la confusion entre mes origines et mon terrain de recherche, entre le passé et l’avenir, entre diverses étapes de l’histoire récente et entre divers groupes d’iraniens…

A travers l’histoire d’une famille ordinaire aujourd’hui dispersée sur quatre continents, Au nom de la Tubéreuse essaye de donner une lecture sensible de l’histoire contemporaine de l’Iran. Il voudrait articuler les événements majeurs de l’Histoire de l’Iran depuis la Révolution 1979 sur les dimensions microscopiques et individuelles des expériences de vie. Le lieu focal du film sera le grand cimetière de Téhéran, Behesht Zahra, et c’est à travers le récit de quelques tombes que l’on découvrira des récits de vies diverses : tantôt simples, tantôt très compliquées, toutes mêlées d’une manière ou d’une autre à la Révolution et ses suites. D’un côté ces tombes appartiennent à une même famille, la mienne, de l’autre, ce sont les tombes des martyrs de la guerre Iran-Irak (1980-1988), devenues objets d’une mémoire d’Etat.

C’est le début d’un travail à la fois anthropologique et intime ; une partie des images sera filmée chez les membres de ma famille en diaspora. Les images d’Iran proviendront des photographies et films personnels ainsi que d’archives familiales, privés et publiques. La création de quelques illustrations pour habiller ce récit est également envisagée.

Reynold, la caméra et moi, par Nathalie Luca

 Tournage de l’enregistrement, Rouen – Crédits : Nathalie Luca

Je suis anthropologue et je travaille sur Haïti, un pays blessé dans sa chair par des catastrophes à répétition, blessé dans son âme par des hommes politiques corrompus, envahi par des ONG qui l’étouffent. Il s’en dégage pourtant une incroyable énergie. Elle m’intrigue. Je l’interprète comme une forme de résistance, une puissance de vie, un désir d’aller vers l’avenir au moment même où l’avenir semble impossible. C’est ce que j’ai essayé de montrer dans un premier long-métrage : « Les porteurs d’optimisme. Entreprendre en Haïti ». Ce film montre le dynamisme des Haïtiens pour l’entrepreneuriat et pour l’entraide. Il montre également la colère des Haïtiens contre des ONG qui ne les respectent pas. Mais je voulais aller plus loin. Je cherchais un personnage capable d’incarner cette résistance et qui me permette, en même temps, de porter un autre regard sur Haïti, de pointer autre chose que sa vulnérabilité. Ce personnage, je l’ai rencontré. C’est mon professeur de créole. Il s’appelle Reynold.

Reynold vit en France depuis une cinquantaine d’années. C’est un réfugié politique haïtien, un compositeur et un chanteur aussi, un homme qui a résisté en chansons à la dictature des Duvalier. C’est un homme très affaibli aussi, malade, une locomotive qui s’essouffle, ralentit, mais toujours avance. Il a le regard lumineux, joyeux, enfantin parfois. Nous sommes devenus très complices.

Reynold se racle souvent la gorge, mange peu, a du mal à s’organiser. Il manque de force ; perd sa voix, s’exaspère, mais n’aime pas qu’on lui demande comment il va. Jamais il ne se plaint. Il a un projet fou : enregistrer un CD. C’est comme un dernier acte de résistance, un testament, un hommage à la beauté des rythmes, à la richesse poétique et à l’incroyable fantaisie d’Haïti. Mais entre sa voix défaillante, l’arthrose et les pertes de mémoire d’un de ses acolytes, ce n’est pas gagné ! Les musiciens sont d’accord pour tenter l’aventure. Pélo, l’ingénieur son, leur ouvre son studio gratuitement. Surtout, Reynold compte sur moi ! C’est ce qui me permet de le filmer. C’est un moyen de le soutenir et la possibilité pour moi de réaliser le film auquel je pensais. Un compagnonnage s’établit entre nous. Nous coopérons dans un esprit d’entraide et de réciprocité non dénué de positions de pouvoir ambivalentes que trahissent les mouvements de ma caméra. Je deviens un personnage. Reynold trouvera-t-il la force, la caméra et moi pour complices, d’aller jusqu’au bout de son projet ? Surtout, parviendrai-je à faire comprendre qu’aider, c’est aussi recevoir ?

Le ciel avait pleuré, par Sabrina Mervin


Entre Najaf et Karbala, des pèlerins se prennent en photo devant un portrait d’Ali Akbar, fils de l’imam Hossein et martyr de la bataille de Karbala. Crédits : S. Mervin

« Comme j’ai hâte de les retrouver, Ali, Hossein, Zaynab… », m’avait dit Mariam, sur son lit d’hôpital. Elle était devenue chiite et selon son souhait, fut enterrée sur la route entre les deux villes saintes de Najaf et de Karbala, en Irak. C’est l’une des voies du pèlerinage qui mène, chaque année, des millions de fidèles vers le mausolée de Hossein pour rendre hommage au « prince des martyrs ». Hommes, femmes, enfants, dans un flot incessant.

En chemin, des affiches racontent la mort de Hossein et de sa famille à Karbala, en 680. Des scènes de leur épopée sont reconstituées, en bois et en tissu, grandeur nature, ou par de petites figurines d’argile.

Des processions avec chevaux et chameaux représentent le « retour de la tête » de Hossein vers son tombeau ; c’est ce voyage que revivent les pèlerins. Ils chantent des hymnes qui retracent la tragédie de Karbala, ravivent la mémoire et le chagrin.

Des « serviteurs de Hossein » leur distribuent toutes sortes de boissons et de plats ; d’autres proposent des lits pour dormir, des massages pour se défatiguer ; à l’entrée de Karbala, d’autres encore transportent des pèlerines sur une carriole pour les soulager.

Les groupes de procession se densifient à l’arrivée vers le mausolée, chacun y allant de sa performance : les hommes se frappent la poitrine en cadence, dans une gestuelle qui devient chorégraphie. A l’intérieur du mausolée, l’exaltation est à son comble.

« Labbayka ! », « Me voici devant toi Hossein ! », clament-ils. Mariam, sentant sa fin proche, disait de même. Sa tombe, d’abord façonnée en ciment, a été refaite plusieurs fois et recouverte de marbre ; mais par qui ? La femme qu’elle était voulait y reposer en paix ; son personnage devient-il une légende ?

Ce film raconte la dévotion amoureuse et la ferveur, parfois impressionnantes qui dépassent les spectateurs extérieurs. Il prend la forme d’une lettre adressée à Mariam, décédée il y a deux ans.

A ces quatre projets développés durant la formation s’ajoute celui de Cécile Boëx :

Syrie, titre à venir

Pleine lune Hama. Capture d’écran d’une vidéo (anonyme) mise en ligne sur YouTube le 6 avril 2012, disparue aujourd’hui

La révolte et le conflit en Syrie ont généré une somme considérable de vidéos réalisées par des protestataires, des activistes de l’image et des groupes combattants, principalement mises en ligne sur YouTube. Depuis que j’ai quitté la Syrie en 2011, après y avoir vécu pendant 10 ans, j’étudie les multiples usages et pratiques de la vidéo par les différents protagonistes du conflit, dans une perspective qui croise les sciences politiques et l’anthropologie audiovisuelle. Ces vidéos documentent les événements mais elles rendent également compte des manières de vivre l’engagement, la protestation, la violence extrême et le deuil. Particulièrement incarnées, ces images sont souvent opaques, fragmentaires. La plupart, peu vues, sont toujours enfouies sous les strates innombrables d’autres images et d’autres sons, lorsqu’elles n’ont pas purement et simplement disparu.

« Syrie : Titre à venir » est d’abord un geste d’exhumation de ces images latentes, orphelines. Comment faire sens de la multitude ? Comment les transmettre, les rendre lisibles et en restituer toute l’intensité ? Il s’agit ensuite « d’aller derrière les images », à la rencontre de ceux qui les ont faites ou qui connaissent leur histoire, plusieurs années après. Qui sont-ils ? Quels regards portent-ils sur ces images ? Qu’est-ce qu’elles (res)suscitent ? Le film se construit ainsi autour de deux parties, qui correspondent à des temporalités et des géographies différentes : celles des images tournées en Syrie au moment des événements dont je ferai un montage, et celles filmées par moi-même dans les lieux d’exil de certains de leurs auteurs. Le conflit étant toujours en cours, il s’agira de préserver l’anonymat de ceux qui apparaissent à l’image. Cette contrainte éthique s’inscrit pleinement dans une approche qui souhaite dépasser la lisibilité immédiate des images trop lisses et invite à une perception plus sensible (par le son, les mouvements de caméra, les souffles et les émotions) de ce qui se trame dans et autour des images. Ici, l’image n’est plus seulement une trace mais bien un acte. C’est aussi une invitation à rencontrer ceux qui les ont faites.

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